Les principales missions des directions des ressources humaines concernent le recrutement et la mobilité interne : trouver les candidats pertinents pour les postes à pourvoir, permettre l’évolution des salariés en leur proposant des parcours attractifs, et favoriser un environnement de travail épanouissant pour les collaborateurs.

Les résultats d’une étude que nous avons menée sur l’emploi montrent que + 31% de nouveaux métiers apparaissent chaque année. Selon la Harvard Business Review, + 60% des emplois actuels disparaîtront au cours des 2 prochaines décennies. Le défi majeur des entreprises, en passant par les recruteurs et les managers, est donc de qualifier, valoriser et développer le potentiel humain dans un contexte en hyperévolution.

La donnée ne parle jamais d’elle-même

Face à aux enjeux d’accélération actuels, les recruteurs ont besoin de «super-pouvoirs». L’intelligence artificielle basée sur la technologie «deep learning» (apprentissage profond) permet d’exploiter tout le potentiel des données non structurées liées à l’emploi et de fournir des indicateurs tangibles pour prendre les bonnes décisions. Étant inspirée du fonctionnement du cerveau humain, cette technique de «machine learning» (apprentissage automatique) permet d’atteindre une pertinence inégalée.

En quelques années, cette technologie a progressé de manière fulgurante. Prenons 2 exemples. En 2006, Microsoft tentait tant bien que mal de dicter un texte que l’ordinateur devait écrire tout seul dans Word, sans «deep learning». En 2012, avec leur assistant personnel Cortana, ils sont parvenus à traduire en temps réel un discours de l’Anglais au Mandarin. En 2016, ces algorithmes ont été à l’origine de la victoire historique d’AlphaGo développé par la société DeepMind (rachetée par Google) contre la légende vivante du jeu de Go, le Sud-Coréen Lee Sedol.

Dans cette vidéo, on voit l’algorithme de DeepMind atteindre le niveau expert en Atari casse-briques en 2 heures seulement.

Aujourd’hui, nous avons la chance de vivre à une époque où le marché et les entreprises regorgent de données liées à l’emploi. Grâce aux techniques de «big data», il est possible de capturer, normaliser, stocker et rendre accessible la donnée. Cependant, pour en tirer le meilleur parti, il faut être capable de l’analyser. Comme le dit Prof. Ivar Ekeland (École Normale Supérieure) : «la donnée ne parle jamais d’elle-même, il faut trouver le moyen subtil de la faire parler». De plus, lorsque la taille de la donnée qu’on étudie est infiniment grande, on ne peut se fier ni à la recette, ni au flair, ni à l’intuition. La donnée a besoin de modèles mathématiques et d’algorithmes adaptés. Le «deep learning» est en train de révolutionner le fonctionnement des géants des technologies (Facebook, Google, Apple, Microsoft, IBM…), la fonction RH n’est pas une exception.

L’intelligence artificielle au service de l’humain

En s’appuyant sur des corrélations, nettement plus pertinentes que de simples recherches par mots-clés, cette technologie permet par exemple de : suivre l’évolution rapide du marché de l’emploi, prédire le prochain poste d’un candidat, évaluer sa candidature automatiquement à partir de son CV en analysant son parcours, ses expériences, ses compétences traverses, et en mesurant son adéquation avec la culture de l’entreprise. Loin de «cloner» les candidats, cette technologie offre de nouvelles perspectives de recrutement en favorisant la pertinence, la flexibilité, la diversité, la rapidité du processus et en apportant des preuves tangibles.

L’intelligence artificielle est un atout au service de l’humain. Elle n’entend pas remplacer l’intelligence humaine ou le rôle du recruteur. Elle joue le rôle auxiliaire d’une extension qui permettra d’augmenter les capacités du recruteur, comme les voitures sont aujourd’hui une extension pour nos jambes. Elle élargira sa vision en la confrontant à celle du marché, lui donnera accès à des indicateurs insoupçonnés et accroîtra la dimension stratégique de la fonction RH. Bref ! Elle lui permettra de se concentrer sur ce qui est de plus humain dans son métier.

Lire l’article sur Libération