Le monde : Riminder, la start-up big data qui veut optimiser le recrutement de talents africains
À 23 ans, Mouhidine Seiv, un jeune ingénieur mauritanien formé à l’Ecole Centrale Paris et à l’Ecole Normale Supérieure, est tombé amoureux des algorithmes et des mégadonnées, ou « big data ». Il y a deux ans, Mouhidine fondait Riminder, sa première start-up spécialisée dans la recherche d’emplois, au cours de l’année de césure qu’il partage alors entre Paris et Nouakchott. Il bénéficie alors des conseils de nombreux pôles de recherche comme le laboratoire d’informatique de l’Ecole Polytechnique. Pour le jeune Mauritanien, tout est parti d’un constat personnel : « La première fois que je suis allé sur un site de recrutement en ligne, je me suis retrouvé devant des milliers d’offres de stages et d’emplois. Mon problème était de parvenir à trouver rapidement l’offre qui me correspondait réellement. » Son inspiration ? Le système de recommandation de Netflix. « J’aime la façon prédictive avec laquelle Netflix recommande des films qui correspondent parfaitement à nos goûts, mais que nous ne connaissons absolument pas. J’ai donc pensé qu’il fallait créer un Netflix du recrutement sur Internet »
Le big data pour détecter les meilleurs talents
Sur le papier, la proposition de valeur de Riminder paraît simplissime. Elle consiste à « matcher », pour reprendre le jargon des chasseurs de talents, offres d’emploi non pourvues et candidats. Mais quelle différentiation avec les sites d’emplois en ligne déjà existants ? Pour un recruteur, pourquoi aller dénicher les meilleurs profils sur Riminder en lieu et place de valeurs sûres comme LinkedIn ou Viadeo ? « Faites un tour sur Google, vous serez impressionné par le nombre de sites d’emplois existants. Aujourd’hui, trouver le bon candidat ou dénicher l’offre d’emploi adéquate équivaut à rechercher une aiguille dans une botte de foin », estime le start-upeur mauritanien. « Le modèle mathématique de Riminder se fonde sur l’analyse de plusieurs millions de parcours types pour fournir les bonnes recommandations. Cette solution permet aux entreprises d’entrer directement en relation avec un public très ciblé. Notre algorithme va calculer le taux de compatibilité offre/candidat, et évaluer automatiquement les candidatures par ordre de pertinence pour le recruteur ».
Que disent les métriques de Riminder quelques mois après son lancement ? « Depuis septembre, nous comptons déjà plusieurs milliers d’utilisateurs acquis sans aucuns efforts côté marketing. Et nous avons permis de réaliser un peu moins de 450 matchs recruteurs/candidats. Nous nous rémunérons à ce moment-là ».
Prochaine étape, l’Afrique en commençant par la Mauritanie
Une technologie de rupture sur le marché du recrutement ? En France, l’approche proposée par le jeune entrepreneur mauritanien est apparue suffisamment innovante pour convaincre fin avril le jury du PEIPS, la compétition pour l’entrepreneuriat innovant du pôle Paris-Saclay. La start-up y a raflé la mise en décrochant le premier prix de 10 000 euros. Mieux, le jeune Mauritanien vient de convaincre le pôle Entreprises de l’Ecole Centrale Paris : Riminder deviendra la prochaine plate-forme de recrutement de référence des Centraliens. Une validation de la fameuse « preuve du concept » qui pousse le jeune Mauritanien à viser l’international, et principalement l’Afrique. « Riminder Africa vient d’être lancé début mai et nous sommes déjà en train de convaincre plusieurs entreprises dans mon pays d’origine, la Mauritanie. Avec notre plate-forme, nous allons commencer à gérer les recrutements de grands comptes locaux comme Mauritel, le premier opérateur télécom de Mauritanie mais aussi Attijari Bank Mauritanie, un des poids lourds du secteur bancaire au plan local. »
Riminder veut maintenant déployer sa solution dans trois pays africains pilotes, avec la Mauritanie en tête de pont. Mais sur le continent, la start-up ne pose pas les pieds en territoire inconnu. De nombreux acteurs commencent à arriver sur le devant de la scène pour structurer et digitaliser le marché de l’emploi. Le dernier en date est Everjobs, un portail de recrutement financé par l’incontournable « Venture Builder » Africa Internet Group (détenu en partie par le groupe allemand Rocket Internet) qui vient de se lancer au Cameroun. Et qui s’étendra comme une traînée de poudre à d’autres pays africains dont la Côte d’Ivoire et le Sénégal.
Pas de quoi décourager Mouhidine, qui mise sur le big data appliqué à la recherche de talents pour fidéliser une dizaine de grands comptes africains d’ici 2016 en gérant directement leur recrutement, et déclencher le fameux effet ricochet. « En Afrique, les réseaux sociaux jouent le rôle de bouche-à-oreille numérique. Plus nous matcherons de candidats, plus les grandes entreprises s’adresseront naturellement à nous ». Riminder compte aussi sur la conclusion de partenariats stratégiques pour renforcer ses positions : la jeune pousse vient d’entrer en négociation avec une grande institution financière internationale pour prototyper un futur projet de « Job Matching » dans plusieurs pays d’Afrique.
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